Il y a des nuits où, au creux du lit, je fais des rêves. Enivré par la fatigue, j’aime à imaginer un autre 6 mai 2012. Quand l’euphorie me taquine mes neurones endormis, j’aime songer que ce soir-là, nous avions assisté à la victoire de Mélenchon.
Mais même dans le temple sanctifié et isolé des rêves, la réalité, parfois, impose ses règles. Ainsi d’autres nuits, où le sommeil se fait moins réparateur, mon esprit imagine la France qui aurait pu naître, si Hollande était devenu le nouveau président de la République.
La victoire de Sarkozy le 6 mai 2012 nous a, disons-le, mis K.O ! Sinon, croyez-moi, je ne me sentirais pas obligé d’écrire sur la politique qu’un concurrent électoral aurait entreprise.
Le programme de Hollande n’est pas celui que je défends, mais au moins, je le reconnais, la conduite de la gauche libérale n’aura pas pu être pire que ce que nous vivons actuellement sous Sarkozy. Alors apaisé, mes rêves nocturnes auraient été un peu plus libres et ambitieux.
Je sais que Sarkozy est de droite. Mais cela fait toujours du mal de voir tant de ministres à l’université d’été du Medef, qui viennent y cirer les pompes des patrons. D’ailleurs, cette onction gouvernementale était bien de mauvais augure pour la suite. S’il s’avère que vous n’avez pas lu la presse, Sarkozy s’apprête, en effet, lors du prochain budget d’exonérer fiscalement les entreprises à hauteur de 40 milliards d’euros. Ce geste, c’est la condamnation à mort du pacte républicain issu de l’après-guerre. Dorénavant, la sécurité sociale sera financée uniquement par les travailleurs. Le capital ne se sent donc plus concerné par l’intérêt général. La droite, ici, disons-le, achève un travail de longue haleine.
Je plains les futurs malades. Je les plains, car tant que nous ne reviendrons pas sur cette réforme, leurs soins seront précaires et leurs vies, malheureusement, gâchées par la gourmandise de quelques-uns.
Ce qui est sûr, c’est qu’avec un gouvernement Hollande, cet attentat n’aurait jamais pu être commis. Hollande, j’en suis persuadé, aurait maintenu en l’état le rapport de force qui permet de financer les soins de tous, y compris des patrons. Ce socialiste n’aurait jamais accepté cette exonération de 40 milliards et l’augmentation de la CSG. Car quand on se sent de gauche, les entreprises passent après la vie et l’humain !
Rien que pour sauvegarder la sécurité sociale, Hollande était préférable à Sarkozy.
Que dire alors du reste ? Assurément, l’écologie va souffrir avec ce second mandat de Naboléon. Quel sketch que l’attribution des permis de forage en Guyane ! Sarkozy, peut-être épris par la légende de son Grenelle de l’environnement, a voulu nommer un vrai écologiste au ministère éponyme. Mal lui en a pris, ceci a failli interdire aux pétroliers de détruire la côte guyanaise.
Je ne pense pas que Hollande, surtout avec le contrat gouvernemental signé avec les verts, aurait permis ces forages en haute mer. Lui, il n’y a pas de doute, n’aurait jamais remercié sa ministre sous demande des lobbys pétroliers. Sur cette question écologique, on perçoit une différence notable entre la Gauche et la Droite.
Ne pas détruire l’écosystème, c’est bien. J’aurai remercié Hollande de son courage de résistance. Mais avouons que la planification écologique défendue par Mélenchon est préférable. Car elle répond et vient résoudre les problèmes sur le long terme. Mais, même dans les rêves, au second tour, on élimine… Ainsi, Hollande, sur l’écologie, cela était incomparablement mieux que Sarkozy. Le doute, ici, n’a pas sa place.
Toujours au creux de mon lit, je n’aurais jamais imaginé Hollande augmenter le SMIC que de seulement quelques centimes. Sarkozy, par sa campagne, fut piégé. Il fut contraint de faire un geste pour l’électorat populaire qui s’est porté sur lui. Ce geste, disons-le, est un doigt d’honneur ! L’augmentation permet de s’offrir uniquement un carambar et puis c’est tout.
Hollande, loin de comprendre la nécessité comme nous d’augmenter le SMIC à 1700 €, aurait, sous la pression de la gauche du PS, probablement consenti à une véritable augmentation du salaire des pauvres. Jamais il ne se serait ridiculisé avec une augmentation d’à peine 2 % en juillet. J’aime à imaginer, qu’inspiré par la mystique de la gauche au pouvoir, il aurait pris le courage d’un véritable électrochoc salarial. J’aurai salué cet effort pour lutter contre la logique de l’austérité.
Si le peuple français avait profité de l’élection pour virer Sarkozy, je me sentirais assurément plus reposé et mes rêves seraient plus personnels. Car voir le nouveau ministre de l’Intérieur s’inspirer de son maitre me ronge. J’ai honte de constater que l’on continue de s’acharner sur les camps de Roms. Voilà l’oeuvre de la droite la plus affreuse qui soit, celle qui consister à demander à des policiers pauvres de s’attaquer à d’autres pauvres. Sur cette question des Roms et des minorités, nous l’autre gauche et la gauche d’hollande, nous nous retrouvons forcement. La défense des opprimés et des prolétaires de toutes origines fait partie de notre génétique commune. C’est pourquoi nous nous reconnaissons respectivement membre de la Gauche.
D’ailleurs, imaginer le PS s’attaquer aux Roms ou virer des associations comme jeudi noir porte à sourire. C’est tout bonnement inconcevable. Et que dire du matraquage médiatique contre la menace islamique que Sarkozy utilise pour noyer le débat politique ? Jamais un président de gauche, même social libéral comme Hollande, n’aurait permis une telle manipulation de l’opinion publique.
Pour toutes ces raisons, je le répète, il faut vraiment virer Sarkozy de l’Élysée ! À cette vitesse, les amis, je ne tiendrais pas 5 ans.
Je ne pourrais jamais me sentir apaiser tant que le traité du TSCG pèsera de tout son poids sur les institutions de notre république. Il est malheureux que Sarkozy ait trouvé une majorité parlementaire pour ratifier ce traité qu’il a rédigé avec Merkel.
La résistance à la soumission à l’austérité éternelle et aux marchés financiers a par contre été salutaire pour l’ensemble de la Gauche. Pour la première fois depuis longtemps, les socialistes se sont montrés dans la Rue pour manifester leur opposition avec nous. Aux côtés des Verts et du Front de Gauche et de centaines d’associations, le PS est venu manifester, en effet, le 30 septembre à nos côtés. Enfin, tous les parlementaires socialistes s’apprêtent à voter contre la ratification du traité du TSCG. Comme ne cesse de le répéter Jean Marc Ayrault, on ne peut accepter une telle perte de souveraineté du peuple sans lui demander son avis. La nécessité du Référundum a donc permis à toutes les gauches de se retrouver.
Mes rêves en jouant au jeu de la politique-fiction me persuadent de continuer à militer pour une présidence de Gauche. Il est dur de voir Sarkozy continuer à se trimbaler chaque jour à l’Élysée et d’entendre ses ministres, chaque matin à la radio, continuer de parler de charges et de compétitivité… La France et son peuple ont besoin d’une véritable gauche au pouvoir. Pour moi, celle de Mélenchon permettrait une rupture nette avec le passé et impulserait un nouvel élan républicain dans les sillons de la nation. Malgré tout, Sarkozy, par sa politique inique, arrive à me convaincre du moindre mal de voir un président comme Hollande au pouvoir. Car, si le 6 mai, nous avions viré Sarkozy par l’élection du candidat du PS, nous nous serions alors débarrassés de cette politique de plombs qui pèse sur notre moral. À croire, si on tire une leçon de cette année, que pour battre la politique de la droite, il ne reste aujourd’hui plus que le Front de Gauche et son ancien candidat Mélenchon.