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La bonne année 2013 de Mélenchon et du Front de Gauche

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souvenirs

Je suis un homme fidèle aux souvenirs. Comme Paul Valery, je crois profondément que la mémoire est l’avenir du passé. Je pourrais donc, dans ces voeux, revenir sur cette formidable et enivrante année 2012. Rien ne m’empêcherait d’évoquer et de repenser à toutes ces images qui brulent et embrasent encore mon coeur. Nous avons partagé tant de joies et de peines. Rien que d’y songer, tous ces souvenirs traversent mon esprit. Je revois ce rouge, ces sourires et ces visages. Je me souviens de l’amour, des rêves, des larmes. L’espoir, la peur, l’extase, l’expectation, tous ces sentiments furent, à un moment ou un autre, ces douze derniers mois, les nôtres. Sur mon visage, lorsque je me regarde dans une glace, je perçois encore les traces des sillons que la fatigue, les sourires et les larmes ont creusés cette année sur mon visage. 2012 fut riche de vie. Mais je n’ai pas envie de m’y replonger tout de suite. D’autres le feront assurément mieux que moi. Je préfère profiter de ces quelques lignes pour tirer un bilan de l’avenir. Je suis persuadé depuis toujours que les mots créent des mondes. Imaginer c’est oeuvrer à l’avenir. Rêver c’est construire demain. Je vais donc, dans mes voeux, donner vie à des lendemains qui pourront, peut-être, chanter notre présent en 2013 :

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Le 31 décembre ne changea rien à l’affaire. Les premières semaines de l’année furent marquées par la morosité économique. Les conséquences de la crise et des politiques d’austérité amplifièrent la morosité et la misère. Le gouvernement tenta d’être rassurant. La réalité était pourtant déprimante. Florange hantait toujours l’actualité. Les salariés réclamèrent, à coeur et à cris, la nationalisation de leur outil de travail. Ayrault clama froidement, un soir au JT de TF1, que l’option n’était toujours pas envisageable tant que l’Europe ne soutiendra pas directement une réorganisation de la sidérurgie. Encore et toujours cette technique de proposer d’agir quand la chimère se laissera enfin attraper… L’opinion ne se laissa pourtant pas duper. La vieille ficelle de l’Europe semblait définitivement usée. Les côtes de popularité de l’exécutif continuèrent à s’effondrer.

Cette perte de crédibilité fut accompagnée et suivie d’un épisode qui marqua durablement l’année. À l’annonce des chiffres du chômage et à la dégradation des prévisions de croissance, les marchés financiers commencèrent, en effet, à attaquer frontalement l’économie française. Moody’s décida, sans sommation, de dégrader la note de notre pays. Le double A nous échappèrent définitivement. Dommage que ce ne furent pas ceux que j’espérais. L’agence aurait pu réaliser, selon moi, un acte de salubrité politique en nous débarrassant des deux A qui polluent le débat public. Je parle, comme vous devez vous en douter, de ceux d’Aphatie et d’Attali. Malheureusement, la réalité, c’est que face à ces attaques, Hollande ne résista pas. Les sons du clairon n’avaient même pas eu le temps de résonner qu’il avait déjà capitulé. Certains le rêvèrent comme Roosevelt. Dans la crise, le masque tomba. Nous n’avions élu qu’un petit Papandreou, un Daladier moderne.

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Cette crise éclipsa pendant quelques semaines les débats qui montèrent dans l’opinion publique sur les coopératives et la nationalisation de Florange. En effet, la presse faisait ses choux gras sur la réalité des chiffres économiques. Comme cela fut prévisible, les comptes de l’état se dégradaient sous l’effet cumulé des conséquences de la baisse de la dépense publique et de l’enrichissement de l’endettement. Le gouvernement avait fait sienne la politique de la Grèce. Le même avenir nous était promis. Hollande aurait pu, pourtant, profiter des attaques des agences de notation pour imposer la réforme de la banque centrale. Il aurait pu, comme les révolutionnaires montagnards, décider d’un emprunt forcé auprès des banques pour profiter indirectement de l’argent gratuit de la BCE. Il préféra mimer maladroitement les mots de Churchill. L’illustre, lui, appela à la sueur et au sang pour protéger l’avenir de son peuple. Notre maladroit, par contre, utilisa les mêmes mots pour protéger la rente des riches et garantir la misère générale.

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La lâcheté se paye cher
. La facture était présentée à tous les petits. Je me rappelle qu’un midi, en rentrant de la Fac, je découvris sur internet dans le Nouvel Observateur que le gouvernement annonça l’ouverture du chantier des retraites. À « chantier », je préfère lui substituer le terme de « bordel ». Car quand j’entendis la ministre « socialiste » évoquer la décision du gouvernement d’amener l’âge légal du départ à la retraite à 63 ans, je savais déjà que la majorité signait d’une plume lâche son acte de mort. Cet évènement était le point de départ d’une année folle.

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Dès l’annonce faite, les verts et Montebourg décidèrent de quitter le gouvernement. Ils avaient fait le juste choix de lutter contre l’austérité. Ils n’avaient plus à se taire ni sur Notre Dame des Landes, ni sur les errements austéritaire du gouvernement Ayrault. Sans rejoindre directement le Front de Gauche, des discussions commencèrent entre Placé, Montebourg et Pierre Laurent. Elles allèrent porter leur fruit dans quelques mois. J’y reviendrais.

La majorité, déjà affaiblie, allait également connaitre des bouleversements irréversibles dans le groupe parlementaire socialiste. Alors que les rebelles syriens annoncèrent leur victoire contre Assad et leur intention de le livrer au tribunal pénal international de La Haye, une trentaine de députés socialistes décidèrent de signer une tribune. Elle s’intitula, si mes souvenirs sont bons, « Pourquoi il faut préserver la retraite à 60 ans ». Ils expliquèrent, comme vous devez vous en douter, qu’ils se refusaient de voter la réforme que le gouvernement voulait présenter au mois de juillet. En faisant les comptes, Hollande savait qu’il ne détenait plus la majorité seule pour faire adopter ce crime. Il décida, dans un premier temps, de constituer une commission interpartisane pour la rédaction de ce texte. Il espérait, en intégrant les députés UMP dans le processus de rédaction, pouvoir obtenir leur soutien lors du vote de cette loi d’inspiration patronale. Mais son subterfuge ne fonctionna pas. Copé et Fillon, en véritables amis, dirent, d’une même voix, qu’ils refusaient de participer à cette mascarade. Hollande appela alors, lors d’une intervention télévisée, à l’union sacrée pour, je le cite, « maintenir la crédibilité de la France sur les marchés financiers ». Quelques députés centristes se proposèrent alors pour rentrer au gouvernement. Mais aucune majorité claire ne se dessinait pour autant pour adopter ce texte. C’était un vrai bazar.

Hollande, en vrai président normal corrézien, décida dans une allocution, au mois d’avril, de dissoudre l’Assemblée nationale. Il préférait donc prendre le risque que ce soit la droite qui adopte la réforme des retraites plutôt que de revenir sur sa politique et devenir un véritable président de gauche…

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Les sondages donnèrent l’UMP gagnante suivie du FN, du Front de Gauche et des socialistes. Mélenchon rentra en campagne. Le programme l’humain d’abord fut rapidement amendé sous la demande des verts. Ainsi, à quelques semaines du 1er tour, le Front de Gauche, quelques députés qui avaient suivis Montebourg et les verts décidèrent de se réunir pour présenter des candidats uniques de ce qu’on appela alors le Front populaire anti Austérité. La presse ne put taire cette initiative qui évoqua tant de choses dans la mystique de la gauche.

Dès cette annonce faite, les sondages s’emballèrent. Comme à la présidentielle, nous dépassions le FN. Mais contrairement à l’année passée, nous ne nous emballions pas pour autant. L’année 2012 nous avait endurci le cuir. Je me rappelle tout de même que le sang froid dont nous faisions preuve avec Mélenchon n’était pas partagé par le premier des socialistes, le mal nommé Désir. Celui-ci n’arrêtait pas les critiques insultantes contre les candidats de la gauche anti-austérité. Il appela les Français à la mesure et au bon sens économique. Il n’arrêtait pas les allusions au populisme, à l’URSS, à Cuba. C’était d’une caricature…

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En plein milieu de la campagne, les salariés de Florange ont su se rappeler à la population. Ils avaient, en effet, décidé d’occuper leur usine et d’appeler à la constitution d’une caisse de solidarité pour financer la réactivation des grands-fourneaux. L’opinion était de plus en plus marquée par cette idée de pouvoir prendre son avenir en mains. Beaucoup reconnaissaient que Mélenchon avait eu raison pendant la campagne quand il annonça que les politiques d’austérité nous conduisaient tous à une catastrophe sans précédent. Hollande, maladroitement, leur offrit une possibilité de se rattraper. D’ailleurs, je me rappelle du slogan qu’avec les camarades nous collions sur tous les murs dans chaque ville. « Austérité pour les riches, Prospérité pour le peuple ».

Je me souviens que, malgré le peu de temps que la campagne nous laissait, le front anti-austérité avait réussi à organiser un grand meeting. Comme l’année précédente, nous choisîmes la bastille. Nous prenions le risque de la comparaison. Du rouge de 2012, le vert avait pris une place plus importante dans des cortèges encore plus massifs de 2013. Quelle joie pour moi d’avoir pu participer à cette marche festive ! Avec mes études en Écosse, je n’avais pas pu assister à la prise de la Bastille du 18 mars. Parfois, c’est drôle, on a parfois le sentiment que l’histoire nous laisse une deuxième chance, comme si elle nous attendait avant de s’enfuir. C’était beau de voir une foule si souriante alors que les premiers mois de l’année m’avaient convaincu que la morosité gagnait chaque strate de la population. Je me rappelle d’un sourire d’une jeune fille dans cette foule. Elle était brune. Son visage m’évoquait quelque chose. Son regard traduisait une soif de bonheur. Elle était l’avenir. Elle était l’histoire. Elle était belle.

Quelques jours après cette réussite, le premier tour eut lieu. Pour faire court, les résultats furent extraordinairement bons. En dehors de quelques bastions, les candidats du programme l’humain d’abord dépassèrent les socialistes. Au second tour, il y eut beaucoup de triangulaires entre le FN, l’UMP et nous. Hollande était désoeuvré autant que les commentateurs qui voyaient leur certitude fuirent sous leurs yeux.

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La nouvelle assemblée élue le soir du second tour était unique sous l’histoire de la Ve République. Grâce aux triangulaires, l’UMP ne put remporter le nombre de sièges attendu. Le FN les avait piégés. En ce qui nous concerne, nous étions en tête dans une grande majorité de triangulaires et dans beaucoup de duels Autre-Gauche droite. Nous détenions alors, ce soir-là, avec nos partenaires verts une majorité d’une dizaine de députés contre la droite et l’extrême droite. En ce qui concerne le PS, ils essuyèrent une défaite encore plus grave qu’en 93. Pourtant, Hollande se refusa, dès l’annonce des résultats, à démissionner. Il préféra nommer Mélenchon premier ministre. Ce scénario qui pouvait prêter à rire, il y a quelques mois, par la grâce de l’absurdité des politiques d’austérité, était devenu notre réalité.

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Un front populaire se substituant à un autre, l’euphorie était une constante. Ces images, vues en étudiant 36 et 68 au collège, étaient aujourd’hui celles de notre réalité. Car à l’annonce de la nomination de mélenchon,  la joie se communia partout. La fête battit son plein. À l’étonnement général, les syndicats décidèrent de soutenir le gouvernement dans sa lutte contre le capitalisme financier. Le nouveau premier ministre avait donc une force de frappe pour imposer son programme. Alors que la bourse s’effondra, nous primes comme décret d’urgence l’interdiction de la libre circulation des capitaux. Les grèves empêchaient certains riches de fuirent avec la caisse. Dans l’euphorie générale, nous décrétions également et rapidement la fin du précariat en interdisant le recours aux CDD au-delà de 5% dans toutes les entreprises. La titularisation de tous les précaires de la fonction publique donna également de l’oxygène à la société française. Le crédit était devenu plus accessible. D’autant que notre décision de requisionner et de nationaliser la banque centrale française nous avait permis de remporter le rapport de force européen. En effet, rapidement, les Allemands s’étaient résolus à accorder à la France et aux autres états qui s’étaient mis dans notre mouvement de libération de se financer directement auprès de la banque centrale.

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Le plus beau souvenir, en ce qui me concerne, c’était la décision prise en fin d’année de créer le salaire maximum. Par cette loi, nous concrétisions cette idée d’égalité et de fin du gavage général. Nous affirmions alors qu’en république, chacun est lié et solidaire. L’écart de salaire de 1 à 20 dans toutes les entreprises était un peu l’équivalent des congés payés de 36. Cette réforme qui paraissait impossible auparavant devenait notre réalité et allait marquer profondément les rapports humains. Et contrairement à ce que prévoyaient les commentateurs, peu de riches partirent. La loi sur l’impôt différentiel permettant de taxer Depardieu et Arnault à l’étranger découragea les plus persévérants. D’autant qu’on ne quitte pas sa famille et sa langue comme ça. Il est fou de croire qu’une Laurence Ferrari irait présenter une émission à l’étranger, car elle gagne moins en France. Il est tout aussi bête de croire qu’un Français compétent partirait à l’étranger pour monter une affaire alors qu’il a toute sa clientèle et ses partenaires dans notre pays… L’arnaque idéologique s’écroulait d’elle-même face à nos rêves qui tissaient notre réalité.

Les lendemains se mirent à chanter. Nous pouvons cesser notre mutisme pour donner voix à ce chant général. Ces rêves, mes rêves, nos rêves peuvent danser avec la réalité. Cette année 2013 dont je vous ai compté l’histoire n’est qu’une fiction. Mais lorsque l’histoire s’emballera, la fiction, le rêve, l’impossible seront les seuls guides d’une réalité libérée de ses chaines. Travaillons tous à écrire sur papier les notes de ces lendemains qui chantent. N’oublions pas que l’année 2012 n’était qu’un début. Faisons de 2013 une étape dans le long chemin pour que l’humain vive un jour, sous nos yeux, dans la liberté, l’égalité et la fraternité.



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